Edito
Entrons dans l’univers des oiseaux, un univers à plumes et un univers de plume, celui des auteurs et des illustrateurs jeunesse, qui portent l’héritage des contes comme de la littérature médiévale qui fait grand prix de ce motif. Certes, motif récurrent dans la littérature adressée aux enfants, mais, il faut le dire très vite, à nos yeux, infiniment plus que cela. Rendons des ailes aux oiseaux… Présomptueux ? c’est qu’il nous faut d’abord dépasser l’amas de clichés symboliques qui leur sont associés (la liberté, l’âme…), puis mesurer à quel point les artistes ont fait exploser les limites d’un motif graphique contraint dans une silhouette universellement reconnaissable, enfin, sortir de la déploration face à la poursuite de l’hécatombe, pour bâtir un numéro qui nous convie à lire et à lever les yeux vers le ciel pour affirmer à quel point nous avons grand besoin des oiseaux. La richesse de la création graphique est mise en lumière dès la couverture avec le clin d’œil malicieux de la « Poule Gauloises bleues » de Jochen Gerner qui, dans un entretien, trace les contours du « minimalisme baroque » qui caractérise son livre d’images, Oiseaux. Ne pourrait-on le dire aussi de ceux de Kveta Pacovska ? Minimalisme qui anime également Les Oiseaux d’Albertine et Germano Zullo. Et baroque des oiseaux fabuleux de Carll Cneut. Gouaches flamboyantes d’Atak qui content l’extinction des pigeons migrateurs au XIXe siècle. Enfin, le dessin d’oiseau reste à jamais associé au dessin naturaliste dont on retrouve trace à la fois dans les travaux de Gerner, les illustrations de Rojan, les gravures de May Angeli ou le cahier de dessins de Martin des colibris. Entre tradition et modernité, l’album jeunesse, donne une épaisseur nouvelle à ces représentations. La question de la dimension écologique est au cœur de ce dossier qui s’ouvre sur « l’écomotif » des oiseaux à travers un panorama d’albums de fiction, réaffirmant le rôle essentiel des histoires pour former une conscience écologique : « Lire, c’est agir ». Il faut ainsi tirer des leçons du passé : Martha était là… pour dire au nom de tous les siens la cruauté de leur extermination. Et Martin des colibris explore le rapport ambigu qu’entretient la science avec le vivant lors des expéditions du XIXe siècle. Question plus vive que jamais dans notre siècle de grandes extinctions : ainsi ces articles préparent-ils notre prochain numéro sur l’écopoétique. En vous offrant la lecture de quelques Poèmes perchés, le plaisir d’un jeu littéraire, Un Truc à plumes !, né d’une savante bibliographie poétique ornithologique et la découverte plaisante des inventions langagières de Bruno Castan dans une dramatisation de Cendrillon, La fille aux oiseaux, nous affirmons avec Patrick Kéchichian1. « Le savoir ornithologique est donc bien un chapitre de l’art poétique! » . Marianne Berissi et Claudine C. Stupar
Claudine Charamnac-Stupar
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