Erin Lange - Ecole des Loisirs


Butter. Une couverture jaune beurre. Petite silhouette iconique d’un gros. La 4e de couv qui dit que ce héros appelé Butter ( la raison en est une scène atroce qui ne nous est pas épargnée) « mangera jusqu’à ce que tout soit terminé ». Ce remake de La grand Bouffe est peu engageant. Vous entrez dans ce roman au Je, donc dans la tête de Butter, lycéen de 192 kg, et vous ne lâchez pas le livre, vous ne lâchez pas la main de cet adolescent malheureux : il est intelligent, d’une lucidité effrayante, d’un humour ravageur, d’une sensibilité touchante, très talentueux au saxophone, mais sa vie est un enfer, centrée sur la nourriture qu’il bâfre depuis l’âge de 11 ans et son obésité extrême qui lui crée un diabète et bien d’autres symptômes morbides sans parler des difficultés à se mouvoir…. Est-ce l’indifférence de son père qui le mine, ou la cuisine consolatrice de la mère qui l’ amené là ? De solitude en humiliations, désespéré de ne pouvoir se montrer dans sa vérité physique à la fille dont il est amoureux et qu’il drague sur Internet, il en est arrivé à ce point de désespoir qu’il met en scène et en ligne un suicide type « grande bouffe ». Devenu objet de spectacle, histrion mis au défi suprême, Il sera dupe un certain temps de ces nombreux amis et followers que le projet lui amène. La traversée du miroir sera douloureuse avant de pouvoir se reconstruire et
retrouver un prénom. Ce point de vue interne au héros entraine un langage jeune parfois vulgaire entrecoupé de « chat », ce style facile sonne juste, c’est bien écrit et bien traduit par V. Dayre. Ce roman ne crée pas seulement de l’empathie pour le « différent », son analyse fine suscite une réflexion sur les attitudes perverses jugées « soft » qui se révèlent nauséabondes et fait comprendre la toxicité de certaines relations adolescentes.

Claudine Charamnac-Stupar